UN BEAU BULLETIN POUR L'INDUSTRIE ALIMENTAIRE BELGE
Mais l'accumulation de defis menace notre competitivite
Les bulletins de Noël pour l'année scolaire 2016-2017 ont déjà été distribués et commentés. Mais à la Fevia, on en est encore aux chiffres de l'an dernier. “Nous attendons les données de 2016, mais pour 2015, nous pouvons déjà affirmer que l'industrie alimentaire s'est relativement bien portée. Elle constitue un employeur industriel important et le secteur se développe grâce à l'exportation", déclare le directeur général, Chris Moris. Quand on lui demande de faire une prévision pour 2017, il est moins positif: “En 2016, il y a eu à l'agenda politique le Brexit, le CETA et le TTIP. Autant de défis importants pour notre compétitivité."
RETROSPECTIVE
Emploi et investissements
“Les chiffres-clés pour évaluer la situation financière d'un secteur industriel sont d'abord l'emploi et les investissements", commence le conseiller économique, Pieter Weyn. “Avec la crise de 2009, nous avons assisté à la suppression d'emplois dans l'industrie de transformation générale, suppression qui s'est limitée à un léger creux dans l'industrie alimentaire. Ces dernières années, l'emploi dans le secteur alimentaire est resté stable au niveau de 2005. D'ailleurs, l'industrie alimentaire est le plus gros employeur industriel du pays, avec 88.000 emplois directs. En 2015 et pour la deuxième année consécutive, les investissements y ont augmenté, de 10% par rapport à 2014. Ici aussi, l'industrie alimentaire est la première de la classe, avec 1,4 milliard d'euros d'investissements dans des actifs matériels fixes en 2015."Chiffre d'affaires et volume de production
“Un autre indicateur-clé important est le chiffre d'affaires", poursuit le directeur général, Chris Moris. “Là aussi, l'industrie alimentaire affiche une plus forte croissance que l'ensemble de l'industrie de transformation, mais depuis 2013, nous constatons un écrêtement de la courbe de croissance. C'est dû à la pression que subissent les prix dans toute la chaîne alimentaire
de l'agriculture à la transformation. En effet, le volume de production total a augmenté de 2,6% en 2015."
CONSEQUENCES DU BREXIT, DU CETA ET DU TTIP
Economiquement, l'industrie alimentaire belge est étroitement liée à la Grande-Bretagne et aux Etats-Unis. 10% de notre exportation totale va vers la Grande-Bretagne. Quant aux USA, ils constituent le principal marché d'exportation de l'industrie alimentaire belge hors de l'Europe. “La Fevia respecte le résultat du référendum et des élections, mais il menace clairement l'industrie alimentaire belge. L'exportation est le moteur de la croissance de notre industrie alimentaire. Or, c'est justement cette exportation qui risque de subir une pression. A court terme, la dévaluation de la livre et du dollar représente le plus gros défi. A long terme, le protectionnisme et l'effilochement du marché unique européen constituent les principaux dangers. L'industrie alimentaire belge demande aux autorités belges de la soutenir dans ce moment difficile et de ne surtout pas prendre de mesures néfastes pour le secteur comme des taxes supplémentaires sur les aliments et les boissons."
DEFIS
Une remarque importante à apporter à ces chiffres positifs est l'accumulation de défis à relever en 2016, constituant selon la Fevia une menace pour la compétitivité du secteur alimentaire belge.
Handicap des coûts salariaux
“Le meilleur exemple est notre handicap au niveau des coûts salariaux, que nos hommes politiques essaient de supprimer avant la fin de cette législature. Via des mesures publiques comme le tax shift et le saut d'index, nous voyons effectivement ce handicap diminuer. En 2014, nos salaires dans l'industrie alimentaire étaient 21% plus élevés que la moyenne pondérée de nos trois pays voisins. En 2016, nous arrivons à 'seulement' 17,4%. Il s'agit d'une amélioration, mais nous sommes toujours très désavantagés par rapport aux pays voisins", dit Weyn.
Coûts d'énergie plus élevés
“De plus, en tant que petites entreprises consommant beaucoup d'énergie, les entreprises alimentaires paient bien plus cher qu'autrefois pour leur énergie. Et ces prix sont plus élevés que chez nos voisins. En huit ans, les coûts de l'énergie ont augmenté de plus de 200% en Flandre et en Wallonie suite aux surcoûts engendrés, par exemple par les certificats verts."
Taxe kilométrique
“Une autre mesure récente ayant un gros impact sur l'industrie alimentaire est la taxe kilométrique pour les poids lourds qui est perçue dans notre pays depuis l'an dernier. Plus de 25% de ce qui est transporté sur route, concerne des denrées alimentaires, transformées ou non. Cette taxe représente un surcoût annuel de 150 millions d'euros pour le transport. Cela va se traduire par une réduction du nombre d'emplois, ce qui se répercutera sur le prix pur le consommateur."
Achats transfrontaliers
“Enfin, nous devons pouvoir proposer les produits alimentaires qui sont vendus sur le marché belge, de manière compétitive par rapport aux pays voisins. Combiné à notre taux de TVA élevé, l'ensemble de taxes indirectes
comme les accises sur le café, les accises sur les boissons alcoolisées et non-alcoolisées, la taxe sur les emballages, la cotisation Point Vert et la taxe santé
entraîne des produits alimentaires plus chers, ce qui encourage les achats transfrontaliers. En 2015, les achats au-delà de la frontière se sont élevés à 723 millions, soit une augmentation de 42,5% par rapport à 2008. Cela aussi, cela constitue une vraie menace", avertit Weyn.
Mauvaises mesures
“Les mesures comme la taxe santé ne font que rendre nos produits plus chers et exercent une pression sur notre compétitivité, alors qu'elles ne sont rien de plus qu'une fausse solution au problème de santé", estime Moris. “Nous serions davantage séduits par une reformulation de la composition des aliments, avec plus de fibres et moins de sel, de sucre et de graisse. Il a été prouvé que ces éléments favorisent la santé du consommateur. Voilà donc notre conseil à l'égard des politiques."
PREVISION
“L'économie mondiale se rétablit et notre handicap salarial diminue. Dans la deuxième moité de 2016, nous avons vu les prix plonger. De plus, nous pouvons nous attendre à une augmentation de la production, ce qui va entraîner une croissance du chiffre d'affaires de 2 à 3%", prédit le directeur général. “Les défis cruciaux comme les achats transfrontaliers seront toujours là et vont même augmenter à cause de la prolifération de nouvelles taxes. Le gouvernement essaie de stimuler un boost économique, mais en agissant de la porte, il l'étouffe dans l'œuf. Notre compétitivité restera donc sous pression en 2017, si bien que notre optimisme ne peut être que modéré."