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Cinq tendances dans l'industrie alimentaire

décryptage avec Marcel Lambregts (Rabobank)  

Trends in de voedingsindustrie

L'industrie alimentaire belge est confrontée à de nombreux défis. La rareté des matières premières et l'impact sur l'environnement sont à l'ordre du jour depuis plusieurs années. Les prix de l'énergie, plus élevés ces derniers temps, incitent encore davantage à la durabilité. Le comportement des consommateurs est également en constante évolution: plus que jamais, l'accent est mis sur la santé et la commodité mentale. Tout cela affecte non seulement les producteurs, mais aussi les fournisseurs. Marcel Lambregts, de Rabobank, décrypte les cinq grandes tendances qui façonneront l'industrie alimentaire dans les années à venir.

Marcel Lambregts is Sectormanager Food bij Rabobank
Marcel Lambregts est directeur du secteur Food chez Rabobank

Tendance 1: les consommateurs paient pour plus de service

Commodité

Les consommateurs belges sont très attentifs au prix mais s'il est possible de gagner du temps ou si le produit est proposé au bon endroit et au bon moment, le prix a souvent beaucoup moins d'importance. Pendant des années, la commodité a été le mot magique incitant les consommateurs à payer les aliments et les boissons plus cher. 

"Une partie de la commodité est intégrée dans le produit, comme le riz à cuisson rapide, la salade prédécoupée, les plats préparés et les kits-repas. En outre, la commodité joue également un rôle dans l'achat du produit. Pensons par exemple aux horaires d'ouverture étendus des supermarchés et des magasins on-the-go. Ces dernières années, l'évolution technologique a permis d'ajouter la livraison. Les box repas, la livraison de repas, la livraison de courses ou la livraison flash sont des solutions logistiques qui permettent aux consommateurs d'économiser du temps et des efforts. Rabobank prévoit qu'en 2030, 15 à 20% des produits alimentaires seront commandés et livrés en ligne", déclare Lambregts.

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Sur chaque euro consacré à l'alimentation par un consommateur du nord-ouest de l'Europe, environ 60 cents vont au produit proprement dit et 40 cents à la commodité. Les consommateurs paient ces 40 centimes pour obtenir un produit alimentaire au bon endroit, au bon moment et sous la bonne forme. Le magasin proprement dit est en quelque sorte un service car sans lui, le consommateur devrait aller chercher son produit à la porte de l'agriculteur, du producteur laitier ou de l'usine alimentaire. Toutes ces formes de service s'accompagnent de coûts supplémentaires, tels que le loyer, les salaires et les frais de transport.

innovation

L'innovation - et donc une grande partie du caractère distinctif des détaillants alimentaires, des producteurs alimentaires et des opérateurs de services alimentaires - se joue principalement au niveau du service. Avec la croissance attendue des produits de commodité, les différents modèles de livraison et les concepts de food service plus nombreux dans le commerce de détail alimentaire - sans parler de l'inflation actuelle due au prix de revient-, les consommateurs paieront les produits alimentaires plus cher dans les années à venir. "Mais face à cela, il y aura aussi plus de coûts. Dans presque tous les cas, la valeur ajoutée sera réalisée par un transformateur de produits alimentaires, un détaillant alimentaire ou une entreprise de services alimentaires. Les aliments et la quantité dans notre assiette ne changeront guère", conclut Lambregts.

Moins de maillons

Comme le service devient une composante de plus en plus importante, le prix consommateur d'un produit est souvent bien plus élevé que ce qu'on ne paie au producteur. Cette différence de prix est à l'origine de nombreuses initiatives visant à réduire le nombre d'intermédiaires entre le producteur et le consommateur, qu'il s'agisse de distributeurs d'œufs, de magasins de ferme ou de livraison de box. C'est ce qu'on appelle le circuit court."

De nombreuses fonctions assurées par les intermédiaires restent nécessaires pour que le produit arrive au consommateur en étant consommable. De ce fait, les coûts restent également élevés. Des coûts qui, grâce à la spécialisation et aux économies d'échelle des intermédiaires, sont souvent inférieurs à ceux que peut atteindre une chaîne plus courte. La vente directe au consommateur fonctionne surtout lorsque l'implication du consommateur dans le produit est relativement importante et/ou lorsque le prix d'achat est suffisamment élevé, mais pas pour l'essentiel des achats.

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Tendance 2: partager davantage de données au sein de la chaîne

Le stress du choix

"Une forme relativement nouvelle de commodité consiste à prévenir le stress lié au choix. Cela peut se faire simplement en limitant l'offre. Une gamme limitée ou un menu court - comme ce que proposent les livreurs flash, les discounters et de nombreux restaurants - permet aux consommateurs de choisir plus facilement. En outre, une gamme ou une offre plus restreinte présente également des avantages opérationnels", affirme Lambregts.

L'offre peut également être adaptée aux souhaits spécifiques des consommateurs dans le cadre de thèmes sociaux importants tels que la santé ou le développement durable. Bien que les citoyens commencent de plus en plus à adhérer à ces thèmes, ils ne le montrent guère en magasin. Les consommateurs sont encore peu enclins à ouvrir leur portefeuille pour des produits plus sains ou plus durables. En outre, la définition de la durabilité reste souvent floue pour les consommateurs.

Numérisation

La condition est qu'il faut une base axée sur des données pour que les entrepreneurs alimentaires - commerce de détail, industrie et food service - composent une offre plus saine ou plus durable. Mesurer, c'est savoir. Il faudra donc partager davantage d'informations sur le produit, les ingrédients et le processus de culture et de production au sein de la chaîne. Au final, l'ensemble de la chaîne, de la ferme à l'assiette, devra se numériser davantage pour répondre à ce besoin de transparence accrue.

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Tendance 3: la durabilité comme avantage concurrentiel

Rapports et innovation

Le développement durable est un sujet brûlant. Avec tous les facteurs - parfois contradictoires - qui entrent en jeu, il est souvent difficile pour les consommateurs d'acheter des produits durables. "Actuellement, la perception joue un rôle important, mais elle n'est pas nécessairement fondée scientifiquement: ce que les consommateurs pensent être durable ne l'est pas toujours, loin s'en faut. Dans les années à venir, l'accent sera mis sur la réduction de l'impact climatique de notre production et de notre consommation alimentaires", affirme Lambregts. Mais d'autres facteurs entrent en jeu pour parvenir à une chaîne alimentaire plus durable, tels que l'azote, la qualité de l'eau et le bien-être des animaux.

Si les fournisseurs veulent vraiment se démarquer en termes de durabilité, ils ne doivent pas fonder leurs ambitions en la matière sur des critères généraux mais utiliser comme base des mesures objectives issues de leur propre chaîne d'approvisionnement. En comparant des chaînes d'approvisionnement entières - de la ferme à l'assiette -, on obtient  davantage de possibilités de valoriser la durabilité en tant qu'élément de différenciation concurrentielle. Cela permet également d'investir davantage dans des initiatives de développement durable.

En outre, il deviendra bientôt obligatoire de rendre compte de manière détaillée de la durabilité de l'entreprise et de l'ensemble de la chaîne. Ainsi, la durabilité n'est plus une option, mais devient un point de travail pour chaque entreprise. Pour en savoir plus sur les rapports européens en matière de durabilité, cliquez ici et pour les principaux piliers d'une transition alimentaire durable, cliquez ici.

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Émissions de CO2

La contribution directe que les entrepreneurs du secteur alimentaire - de l'industrie au commerce de détail et au food service - peuvent apporter à la durabilité de leur offre est limitée. Si l'on prend l'exemple de la réduction des gaz à effet de serre, seule une petite partie des émissions peut être directement liée à la production ou aux activités de vente des détaillants ou à la majeure partie de l'industrie alimentaire.

La plupart des émissions se produisent dans la chaîne d'approvisionnement, c'est-à-dire dans le secteur primaire et lors de la consommation du produit concerné (Scope 3). Si les entreprises alimentaires veulent faire de la durabilité une arme concurrentielle, elles doivent collaborer avec leurs fournisseurs pour garantir une plus grande durabilité dans la chaîne.

scopes van uitstoot

gestion de la chaîne

La gestion de la chaîne est donc essentielle: une partie dans la chaîne formule les exigences en matière de durabilité et surveille les progrès et les accords. C'est celui qui paie qui décide, et la gestion de la chaîne incombera donc en grande partie aux chaînes de supermarchés et aux producteurs de grandes marques. D'un autre côté, les fournisseurs seront de plus en plus dépendants de ces acheteurs.

"En raison des exigences spécifiques au niveau du fonctionnement et des matières premières, on ne peut pas changer de fournisseur aussi facilement. L'interdépendance au sein des chaînes augmente, si bien que les ventes sont davantage garanties et que les négociations de prix sont plus équilibrées", poursuit Lambregts.

Cette tendance accélère également la nécessité de poursuivre la numérisation. Qu'il s'agisse de composer un assortiment sur base de mesures objectives ou de mettre en place un label sur le devant de l'emballage tel que l'Eco-Score, la coopération au sein de la chaîne dépend de la confiance mutuelle et de l'échange de données. Les fournisseurs devront de plus en plus enregistrer et numériser leurs activités afin de fournir au gestionnaire de la chaîne les bonnes données en temps voulu.

Circulaire

Enfin, le modèle économique linéaire actuel de la chaîne alimentaire n'est pas viable à long terme. La pression sur le capital naturel, y compris la biodiversité, le climat et la qualité de l'air, augmente. Nous devrons donc commencer à produire de manière plus circulaire et en fonction de la demande. Le point de départ consiste à encourager la réutilisation des matières premières et des produits dans la mesure du possible et à réduire la destruction de valeur.

Plus nous parvenons à fermer notre chaîne alimentaire comme un cycle, plus elle devient durable d'un point de vue écologique. Dans un monde idéal, le cycle de vie d'un produit est prolongé autant que possible et les déchets sont réduits au strict minimum. Malgré la fonction dirigeante et le pouvoir de marché de la distribution alimentaire et des grandes entreprises, cela conduira à une meilleure répartition des revenus au sein des chaînes, en raison de la transparence et de l'interdépendance.

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Tendance 4: une alimentation plus saine relève d'un changement de comportement

Encourager les comportements

La grande majorité des consommateurs indiquent que la santé est un facteur qui entre en ligne de compte dans leurs décisions d'achat de produits alimentaires. La plupart des consommateurs connaissent la pyramide alimentaire, mais ont encore tendance à acheter des aliments qui ne sont pas recommandés. Néanmoins, l'offre des supermarchés est fondamentalement suffisante pour faciliter une alimentation saine. Manger plus sainement est donc principalement une question de comportement.

Par l'éducation (personnelle), la stimulation subtile (nudging), la politique des prix et/ou la réglementation de l'offre, les pouvoirs publics, les services alimentaires, le commerce de détail et les producteurs de denrées alimentaires peuvent tenter d'influencer positivement les choix des consommateurs. La coopération au sein de la chaîne et avec le secteur des soins de santé est essentielle à cet égard.

impact

L'attention accrue portée aux aliments plus sains n'a qu'un impact limité sur la chaîne. En fonction de l'efficacité des mesures prises, la demande peut se déplacer légèrement entre les produits moins sains et les produits plus sains. Pour mesurer efficacement les succès et les échecs, il est nécessaire de renforcer la coopération ou d'encourager les consommateurs par d'autres moyens, comme le Nutri-Score figurant sur l'emballage.

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Alimentation personnalisée

"La personalised food est souvent citée comme LA solution pour inciter les consommateurs à manger plus sainement. Contrairement à ce que son nom suggère, l'alimentation personnalisée est principalement un service (conseil) et non un produit spécifique, même si l'offre de compléments alimentaires personnalisés est également appelée à se développer. Grâce aux développements technologiques (capteurs, bases de données, IA), de plus en plus d'applications autour de l'alimentation personnalisée seront disponibles dans les prochaines années", affirme Lambregts.

L'alimentation personnalisée est idéale pour influencer le comportement des consommateurs, car elle rend les conseils diététiques personnels et les consommateurs semblent y être plus sensibles. La croissance de l'alimentation personnalisée n'est pas uniquement réservée aux start-ups et aux nouvelles plateformes. Les producteurs de denrées alimentaires, les détaillants et les entreprises de services alimentaires existants peuvent également attirer des clients avec des produits spécifiques destinés à des groupes cibles particuliers. L'impact sur les fournisseurs de matières premières sera limité, étant donné que l'on utilisera principalement des ingrédients existants; en d'autres termes, l'alimentation personnalisée ne nécessite pas de matières premières supplémentaires produites uniquement pour la personne.

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Tendance 5: le pouvoir de marché accru des supermarchés

Part d'estomac

Dans le domaine concurrentiel de l'industrie alimentaire, la part d'estomac - la part de ce que mange un consommateur moyen - des supermarchés est élevée et l'achat par des organisations de food retail est largement consolidé. Environ 85% des achats sont effectués par les supermarchés et les magasins spécialisés et environ 15% par l'horeca et d'autres services alimentaires. En outre, les hard discounters en Allemagne, aux Pays-Bas et en Belgique détiennent une part importante du marché.

En raison de l'achat consolidé et de la concurrence des hard discounters, la concurrence par les prix entre les supermarchés est élevée. Les consommateurs sont très attentifs aux prix en raison de l'accent mis pendant des années sur les niveaux de prix et les promotions dans le marketing des détaillants alimentaires et dans les magasins.

Cette situation a un impact sur les fournisseurs. Les négociations des organisations d'achat avec les producteurs de denrées alimentaires et les fournisseurs de produits frais sont généralement sur le fil. Ces parties collaborent souvent avec les détaillants alimentaires en matière d'achat ou disposent déjà d'une position de négociation forte en raison de l'assortiment limité qu'elles proposent, ce qui signifie qu'elles n'ont pas besoin des mêmes économies d'échelle que leurs collègues des supermarchés.

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négociations

Les supermarchés tels que nous les connaissons aujourd'hui sont confrontés à une concurrence croissante de la part du secteur de l'horeca (blurring) et de concepts relativement nouveaux tels que les box repas, la livraison à domicile et, récemment, la livraison éclair. Alors que la part d'estomac des supermarchés devrait subir la pression de ces nouveaux venus et de l'horeca au cours des dix prochaines années, ce n'est probablement pas une bonne nouvelle pour les fournisseurs à la table des négociations.

Les achats se professionnalisent aussi rapidement sur le marché du food service, d'autant plus que les chaînes de food service se développent à un rythme supérieur à la moyenne. En outre, les fusions et acquisitions se multiplient sur le marché de gros du food service. Par ailleurs, les consommateurs choisissent l'endroit où ils mangent de manière de plus en plus consciente. Dans les restaurants quelconques, on ne sait généralement pas très bien ce qu'il y a au menu alors que dans les grandes chaînes, les consommateurs savent ce qu'ils obtiennent pour leur argent. Avec la montée en puissance des livreurs flash et des fournisseurs de box repas, les opportunités de vente pour les fournisseurs peuvent s'élargir, mais cela n'enlève pas la pression sur les négociations de prix.

collaboration

Entre des milliers d'agriculteurs et de producteurs de denrées alimentaires, et des millions de consommateurs, se trouve un nombre relativement faible d'acheteurs du food retail et du food service. Cette situation ne va guère changer. L'interdépendance qui se crée dans les chaînes axées sur le client, la recherche de plus de service et de plus de valeur ajoutée et la rareté actuelle de certaines matières premières rendent les rapports de force un peu plus équilibrés.

"C'est précisément grâce à une collaboration plus étroite avec les détaillants, les producteurs et les services alimentaires que le secteur primaire peut souvent négocier de meilleures conditions contractuelles, y compris des prix plus élevés, des durées de contrat plus longues et des ventes plus stables", conclut Lambregts.

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Écrit par dr. Alexis Daveloose1 juin 2023
Magazine imprimé

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08 septembre 2025

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