Facteurs de choix pour les desinfectants

Des caracteristiques typiques jouent dans la selection des desinfectants

Dans un précédent article, nous avons approfondi les méthodes de désinfection physique. Plus courante est toutefois l’utilisation des techniques de désinfection chimiques, dont le but est également de réduire le nombre de pathogènes, de corrupteurs microbiens, de spores et de populations virales. Un désinfectant est une substance chimique qui réduit la population de micro-organismes viables à un niveau qui ne menace plus la sécurité et la qualité d’une denrée alimentaire. Un désinfectant n’a pas non plus pour but de garantir une extinction totale de n’importe quel micro-organisme, y compris les spores.

Efficacite et specificite

Les désinfectants ne sont efficaces que si une surface est propre. Ceci veut dire: pas de résidus alimentaires, la propreté au toucher et l’absence d’odeurs. Les restes de produit peuvent absorber et neutraliser les désinfectants, si bien qu’ils perdent de leur efficacité. Le nettoyage préalable à la désinfection des surfaces doit donc se faire en profondeur, selon une procédure prescrite. Les désinfectants peuvent viser l’élimination d’un micro-organisme spécifique au sein d’une population microbienne mais les désinfectants ‘à large spectre’ sont utilisés plus souvent.

Mode d’application

Les désinfectants, généralement sous forme dissoute, peuvent être appliqués sur la surface à désinfecter par pulvérisation (sous pression ou non), immersion dans un réservoir rempli d’une solution désinfectante (désinfecter dans le cadre d’une procédure cleaning-out-place), ou par l’envoi d’une solution désinfectante à travers les appareils de processus et les conduites. Outre l’application directe sur les appareils, les désinfectants peuvent être mis en contact de façon indirecte avec la surface à désinfecter, à savoir par fumigation ou atomisation.

Proprietes et selection

Efficacité

Les désinfectants ont de préférence un large spectre dans le cas d’une concentration d’usage aussi faible que possible. En raison de la grande diversité morphologique des micro-organismes, l’action d’un désinfectant déterminé n’est pas uniforme le plus souvent. L’état dans lequel se trouve le micro-organisme est tout aussi déterminant pour la résistance qu’il peut offrir à un désinfectant. C’est ainsi que les spores sont plus difficiles à désactiver que des cellules végétatives. L’environnement est aussi déterminant. Les bactéries dans un état sec sont nettement plus résistantes que dans un milieu aqueux.

La réalité est qu’une surface entièrement stérile est une utopie après désinfection. La plupart des micro-organismes survivants ne sont pas non plus en mesure de menacer la qualité de l’aliment. L’efficacité d’une solution désinfectante est déterminée de façon importante par le degré d’humidification de la surface. En effet, l’action d’un désinfectant n’est optimale que quand l’humidification de la surface totale est garantie. Ceci rend indispensable l’ajout de substances actives en surface.

Résistance

Contrairement aux antibiotiques, les désinfectants ont une multitude de points d’accroche sur les cellules microbiennes, les spores et/ou les virus. Ceci diminue nettement le risque de développer la résistance aux désinfectants. De préférence, les désinfectants ont une action rapide et ne provoquent pas d’effet irréversible, et donc destructif permanent, au niveau de la cellule microbienne ou des particules de virus. Toutefois, tous les désinfectants ne sont pas efficaces sur les spores ou virus et une flore cutanée résistante peut bel et bien se développer dans une installation de processus ou un bâtiment d’usine. Pour combattre le développement d’une résistance potentielle, on conseille de changer fréquemment de désinfectant.

Il est conseille de changer frequemment de desinfectant. Pour la selection, on cherche souvent un compromis entre les caracteristiques desirees et indesirables

Sensibilité aux résidus et à l’eau

Les effets négatifs des résidus organiques sur l’efficacité du désinfectant ont déjà été évoqués. Ceux-ci diffèrent toutefois selon le produit. Des résidus de détergent peuvent aussi avoir un effet négatif. Ainsi des ‘quats’ (sels d’ammonium quaternaire) sont sensibles à la présence de surfactants anioniques, parce qu’ils peuvent entraîner ensemble la formation d’une liaison saline inactive. Au moins aussi importante est la dureté de l’eau, qui peut également diminuer l’effet microbicide des désinfectants. Mais ici aussi, l’effet peut différer selon le produit. La sensibilité des différents désinfectants aux résidus organiques, à la dureté de l’air et aux détergents se retrouve dans le tableau 1.

Température

Le fournisseur d’un désinfectant postule souvent une certaine température de fonctionnement, qui est également différente pour chaque désinfectant. Les températures de désinfection classiques sont 38-45 °C (eau chaude) ou 50-75 °C (eau chaude).

Temps

En vue d’une efficacité suffisante, la durée de contact entre les micro-organismes et le désinfectant doit aussi être suffisamment long. Etant donné les différences d’efficacité, le ‘temps d’exposition’ minimum exigé dépend du désinfectant. Le choix du désinfectant est aussi déterminé par le temps disponible que postule le producteur de denrées alimentaires. Le ‘downtime’ pour le nettoyage et la désinfection signifie le plus souvent une perte de production, si bien que ceci est de préférence minimisé.

Stabilité

Afin de pouvoir agir suffisamment, le désinfectant doit aussi être stable (voir tableau 3). La préservation de la capacité de désinfection exige une stabilité suffisante en cas de stockage de longue durée.

Lorsque le désinfectant est suffisamment stable pendant l’utilisation, une surveillance continue du désinfectant n’est pas exigée.

Attaque de la surface

Les désinfectants ne peuvent surtout pas corroder ou attaquer d’une autre manière les surfaces d’installation. En effet, la corrosion a pour effet de rendre la surface rugueuse, ce qui permet aux résidus alimentaires et aux biofilms de mieux s’y incruster. A leur tour, ces biofilms protègent les micro-organismes, si bien que ceux-ci sont plus difficiles à détruire. Les micro-organismes trouvent aussi plus facilement un abri dans les pores plus profonds d’une surface, et étant donné la grande tension de surface de l’eau, ils ne sont pas toujours atteints par le désinfectant. Plus l’attaque est minime, plus la durée de vie de l’appareil est longue et moins ceci exige de l’entretien.

L’éventuelle attaque des surfaces ne se limite toutefois pas à la seule corrosion. La décoloration de certains plastiques par certains désinfectants peut aussi se produire. La connaissance de tous les matériaux utilisés dans la construction d’un appareil de production est importante.De même, le pH de la solution désinfectante peut être un indicateur de son caractère corrosif par rapport à certains matériaux. C’est ainsi que l’acide peracétique et l’hypochlorite sont assez corrosifs tandis que le peroxyde d’hydrogène et l’ozone peuvent attaquer les joints en caoutchouc. Les iodophores peuvent induire la décoloration de certains plastiques.

Qualité et santé

Des résidus de désinfectant peuvent surtout altérer les propriétés sensorielles des denrées alimentaires produites par la suite. Du reste, des désinfectants résiduels sur des surfaces désinfectées peuvent aussi avoir un effet négatif sur la santé des opérateurs dans l’usine. Lorsque les résidus de désinfectant aboutissent dans les produits finis emballés, ceux-ci représentent même un risque pour la santé publique plus large. Un désinfectant ‘food grade’ est donc préféré, mais n’est pas la solution parfaite pour préserver la santé du consommateur. Tous les désinfectants doivent être faciles à rincer. Meilleur est le rinçage des résidus de désinfectant, plus court est le temps nécessaire pour y parvenir. Le tableau 2 donne une idée des désinfectants pouvant causer des problèmes de rinçage, de résidus de désinfectant et de propriétés sensorielles divergentes. On sait par exemple que les quats peuvent coller sur des surfaces en acier inoxydable et donner un goût amer aux denrées alimentaires.

Environnement et toxicité

Bien entendu, les résidus de désinfectant aboutissent dans les égouts et finalement dans l’épuration des eaux. Cette dernière est basée sur une biomasse microbienne qui dissout les restes organiques, y compris les restes de désinfectant. De préférence, un désinfectant n’est pas destructif pour cette biomasse microbienne. Un processus d’épuration des eaux qui fonctionne mal entraîne en effet une dissolution réduite des polluants organiques et peut être la cause de nuances olfactives, en définitive.

Bien entendu, la charge environnementale doit être minimisée (voir tableau 3). Dans certains cas, des techniques analytiques peuvent être engagées pour détecter les résidus de désinfectant. Le déversement direct des eaux usées contenant des résidus de désinfectant peut menacer la survie de la faune et de la flore aquatiques.

Le désinfectant ne peut donc pas être trop toxique (tableau 3), afin de pouvoir appliquer des opérateurs de nettoyage sur les appareils sans risques pour la santé.

Certains désinfectants sont appliqués au moyen de la fumigation (p .ex. oxyde de chlore, ozone) ou pulvérisation (p.e. peroxyde d’hydrogène), avec accès totalement interdit à l’espace. Malgré la ventilation de l’espace après une désinfection réussie, de petites quantités de désinfectant peuvent rester en suspension dans l‘air.

Utilisation sécurisante

Les désinfections doivent aussi être sûrs pour le transport, le stockage et l’utilisation (voir tableau 3). Cependant, il est souvent illusoire de croire que des équipements de protection individuelle ne seraient pas exigés. Les désinfectants sont des biocides et les individus n’y sont pas immunisés. Une utilisation sécurisante par les opérateurs de nettoyage nécessite la formation requise.

Coûts

Etant donné leurs faibles marges bénéficiaires, les entreprises alimentaires visent à réduire les coûts. Néanmoins, ce n’est pas tellement le coût effectif du désinfectant qui est important mais bien le rapport entre la somme de l’efficacité, de la sécurité et de l’aptitude à l’usage, et le prix. Au moins aussi important est encore le service après-vente, proposé par le fournisseur de détergents.